Quelques portraits d'enfants
Thibault
Dans une drôle de maison, j’ai aperçu un lion.
Habillé tout en rouge, l’air tranquille, l’œil rieur,
Il rêvait en couleurs d’une nouvelle invention.
Dessinant son idée sans se laisser troubler,
Il s’arrêta seulement à l’heure de grignoter.
Notre lion n’était pas un très grand orateur,
M’obligeant pour l’entendre à bien tendre l’oreille.
Mais devant le dessin il contait à merveille :
Un grand arbre aux feuilles bleues l’emmenait jusqu’au toit.
Et là, sur un bateau fait en bois de Kapla,
Il dansait dans une bulle, au rythme de son cœur.
C’était un vrai dandy, aimable et très charmeur.
Ah, mais vous l’ai-je dit ? Le nom du lion ? Thibault !
Suivez, pour le trouver, la route de Lego.


Ysé
Devant son pain au lait, savourant son Kinder,
Ysé s’invente un monde, l’air joyeux et rêveur.
Pour ne rien oublier, elle s’empare d’un carnet
Puis liste avec entrain ce qu’elle apprécierait :
Elle n’irait plus au lit avant ses sœurs, son frère
Car la nuit s’enfuirait de ce bel univers !
Chaque heure de la journée permettrait de jouer. Aucune activité ne serait imposée.
Les devoirs, les repas, et jusqu’à la toilette, Deviendraient un spectacle, auraient un air de fête.
Le placard de maman, long comme une avenue, Chanterait « Chère amie, choisissez vos tenues.
A vous, tout est permis, vous avez tant de goût !
Quelle allure, quelle audace ! Vraiment, vous osez tout ! » Elle irait, sautillant, entourée de paillettes,
Cueillant sur le chemin des milliers de pastèques.
A ceux qui trouveraient que c’est exagéré,
Elle dirait qu’elle préfère la générosité.
A la fin du goûter, Ysé, les yeux brillants,
A le cœur traversé d’un étrange sentiment :
Saura-t-elle étonner Ambre, Emmanuel, Lison
Par ce qu’aura créé son imagination ?
Mais voilà qu’elle entend au sein d’un atelier
Un chapeau lui crier « Quand viens-tu m’essayer ? »
Elle découvre un bibi fait de fils de lumière.
Il rayonne comme Ysé, la petite dernière.
Ethan
Je marchais fatiguée quand je l’ai rencontré.
Il courait en riant, un ballon dans les pieds,
J’en suis sûre : il chantait un air de Stromae
Et le soleil lui-même courait à ses côtés.
Mais le matin suivant, c’est sur sa trottinette,
Qu’il filait en ayant une idée dans la tête :
Sauter dans la piscine, nager sans bouée sous l’eau,
Être fort, être grand, écouter les « bravo ! ».
Me voyant comme la veille avancer lentement,
Il m’a crié « Veux-tu un toboggan géant ?
Je l’ai construit en rêve, j’y glisse dès le réveil !
De mon lit à l’école, c’est une piste aux merveilles.
Si ça ne suffit pas, je t’emmène avec moi.
Nous voyagerons en train, je ne pense qu’à ça.
J’ai prévu le chemin, regarde mes rails en bois !
Et tout le monde dira : Ethan est passé là ! »


Rémi
Que dirait le ficus s’il pouvait chuchoter ?
« Sous son regard patient j’ai adoré pousser ! »
Que dirait la guitare après avoir chanté ?
« Ses doigts persévérants ont su m’apprivoiser ! »
Que répondrait Rémi à ces deux compliments ?
« Vous parlez ? Quelle surprise, je ne le savais pas !
Il me faut vite comprendre et comment et pourquoi !
Conversons dans ma chambre, mais avant, promettez
De ne rien déranger, d’essuyer bien vos pieds.
J’aime l’ordre voyez-vous, tout comme la propreté.
A présent, continuez, confiez-moi vos secrets.
L’école n’en saura rien, c’est entre vous et moi.
Et pour être certain de ne rien révéler.
Je ne bavarderai désormais qu’en chinois. »
Alice
Un lapin très pressé se rendait à une fête.
Rose était son chapeau, roses étaient ses chaussettes.
Il aperçut Alice et souhaita l’inviter,
La voyant chalouper sur un air de reggae.
Alice était ravie, elle adorait danser.
« Mille mercis ! Je vous suis si vous pouvez attendre.
Je voudrais, pour maman, dessiner un mot tendre.
Sur la table ou le mur ? J’aimerais la surprendre ! »
Puis Alice s’entoura d’un boa à paillettes,
Et sauta dans sa plus jolie paire de baskets.
Courant à perdre haleine, elle arriva en tête !
L’assemblée, subjuguée, applaudit sa prouesse.
Du royaume des licornes elle devint la princesse,
Et la fée des dragons lui promit de l’aider,
Quand ses deux frères auraient l’idée de l’embêter.


François
L’avez-vous vu passer ? Un enfant aux yeux bleus,
Un géant de dix ans au sourire contagieux.
L’avez-vous vu courir, rouler, sauter, grimper ?
Était-il à vélo, en train d’escalader ?
François ne le sait pas : c’est lui l’aventurier,
Le sportif passionné, agile, vif et doué,
Dont parlent les immeubles, les parcs et les forêts !
Pour l’heure il examine dans la glace son reflet,
Rectifie les détails d’un nouveau déguisement.
Il demande, en français, son avis à maman,
Puis répète sa requête à papa en anglais.
Pour finir il enlève sa cape et son épée,
Et revêt une veste -elle lui va à merveille-
Sous un nœud papillon qui lui donne des ailes.
A ce point d’élégance, l’on dirait un dandy !
François voudrait aussi un chien, juste un petit.
Il lui raconterait les cabanes et les cimes,
Ses débuts sur un skate aux côtés de Maxine,
Les univers virtuels où jouer entre amis,
Son goût pour le dessin, les textes qu’il écrit.
Souvent, sur le papier, il pose des mots gentils
Ou des histoires glaçantes, pleines de péripéties.
Mais l’enfant au cœur tendre n’aime rien tant que la paix.
Il rêve d’un minibus qui le transporterait
Sur les terres d’Amérique, lui, son chien, ses copains,
Pour gravir l’avenir, s’élancer vers demain.